Mon résumé
Angie Maro est psychiatre à la clinique des Oliviers, en région parisienne. Une femme ayant une bonne situation donc. Pourtant, son monde va peu à peu se désagréger, alors que, subrepticement, elle glisse de la vie à... autre chose. La cohérence du monde autour d'elle s'effrite, elle se rend bien compte que quelque chose ne va pas. Jour après jour, sa déchéance se poursuit, s'accentue, à mesure que sa mémoire et sa lucidité cèdent le pas... jusqu'à quelles extrémités ? Bienvenue dans un voyage au bout d'un enfer intérieur, bienvenue dans le cauchemar d'Angie Maro...
Appréciation générale
En une phrase : Un voyage au bout de l'oubli, au bout de la folie, dans lequel on pénètre tout doucement, par petites touches, pour se retrouver emporté par le tourbillon d'une vie sombrant dans la maladie mentale. Un roman qui m'a fait penser à Shutter Island (tant le roman que le film), qui nous fait entrer dans le cerveau d'une femme sombrant dans la maladie d'Alzheimer.
Ce que j'ai particulièrement apprécié :
J'ai particulièrement apprécié la minutieuse construction des personnages - y compris des personnages secondaires - ainsi que le dosage parfait de normalité et d'anormalité, ainsi que l'évolution presque imperceptible de cette dernière, jusqu'à l'explosion exponentielle finale. On voit clairement que l'auteure a planifié son ouvrage de A à Z, ne laissant rien au hasard. Un travail très consciencieux donc, et une maîtrise parfaite de l'art du dosage et de la structure narrative.
Autres commentaires
Style littéraire :
Indéniablement bien écrit. Trop même. D'où ma relativement bonne note malgré ce qui va suivre, car à mes yeux, cette "bonne écriture" est paradoxalement le grand point noir de ce roman... et ce alors que je suis certain que l'auteure a voulu bien faire, mais le problème est que ça se sent ! Certes, il n'y a quasi aucune faute de français, et l'on sent bien la volonté de la phrase et du vocabulaire riche, du travail bien fait, mais le résultat est extrêmement scolaire, analytique presque, et du coup antinomique par rapport aux choix artistiques initiaux de rédaction au présent à la première personne du singulier. Ces derniers sont pourtant parfaits pour ce genre de récits. Sauf qu'une fois ce choix opéré, il faut le mener jusqu'à son terme, en mettant la langue et le rythme en adéquation avec la psychologie du personnage. Ici, cette dernière est bien décrite, presque cliniquement même, mais cette volonté de maîtrise est en inadéquation avec la déchéance mentale de l'héroïne, rendant le style littéraire de plus en plus inadéquat à mesure que l'intrigue progresse, et qu'Angie sombre dans sa maladie. Bref, pendant toute ma lecture, j'avais l'impression de lire la déchéance d'Angie Maro racontée de manière trop appliquée, pour un texte qui mériterait à mes yeux d'être plus instinctif. Je suis conscient que cette partie de mon évaluation peut sembler dure, mais j'estime que c'est là mon devoir d'honnêteté envers l'auteure : si malgré ces défauts elle est arrivée à me faire lire son roman jusqu'au bout, je pense qu'écrit comme je le souhaiterais, ce roman aurait un véritable potentiel de best-seller. À retravailler donc, mais indéniablement, l'auteure tient un concept et un récit fort. Reste à le mettre en musique d'une manière moins scolaire et plus instinctive, animale presque. Enfin je signalerais que les dialogues entre guillemets, non marqués par des tirets cadratin ne me semblent pas non plus être le choix le plus pertinent ni le plus visuel. Une fois de plus, je m'excuse auprès de l'auteure pour la dureté de ce passage, mais il y a un tel potentiel dans ce roman qu'il serait dommage de le gâcher à ce niveau-là. Aux éditrices : vous avez une meilleure connaissance du paysage éditorial que moi. À vous de juger si cette écriture peut rencontrer son public. Personnellement je ne suis pas client - malgré le vrai coup de coeur pour l'histoire en elle même - mais à voir, selon votre ressenti et celui des autres lecteurs. Je ne suis peut-être pas représentatif de son lectorat potentiel...
Mon sentiment sur le titre du livre :
En adéquation avec... mon avis sur la note littéraire : trop froid, trop impersonnel, trop appliqué. Il faut trouver quelque chose de plus impliquant, un titre qui "s'auto-matraque", qui interpelle le lecteur en une phrase. Quelques idées qui me viennent spontanément: "Et la vie m'a jetée par dessus bord", "Moins qu'hier, plus que demain", "La vie rêvée de... de qui au fait ?"... Quelque chose qui frappe, qui interpelle, qui happe. De l'instinctif, de l'animal quoi...
Ce que je pense des personnages :
Comme déjà dit dans "les plus", ils sont en eux-mêmes extrêmement bien conçus, crédibles, avec leur lot de zones d'ombres. Aucun souci à ce niveau-là : c'est ici un sans fautes ! Bravo !
Ce que je pense du thème général du livre :
Un thème sensible, très actuel, angoissant à souhait, car aucun d'entre nous n'est à l'abri. Un thème qui assurément justifie qu'on en fasse un excellent roman !
Ce livre ferait-il un bon film ? :
Paradoxalement oui, même si ce roman est très intérieur, et que les romans très intérieurs passent en général mal à l'écran. Pourquoi ? Car justement un cinéaste débarrasserait ce récit des éléments perturbateurs notés ci-dessus, au sujet des qualités littéraires du roman. Pour peu que le réalisateur soit un tant soit peu doué pour des récits psychologiques, ça pourrait le faire.
Evaluation par TNK
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